Manifestations

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JOURNEES D’ÉTUDE EJJE DES 5 & 6 OCTOBRE 2023
L’ACTION COLLECTIVE TRANSFORMATIVE EN JUSTICE ENVIRONNEMENTALE (2NDE SESSION)

Face aux études démontrant les limites des politiques publiques du développement durable et de la transition à lutter contre les changements globaux, à protéger l’environnement et la santé des populations, certains auteurs et certaines autrices voient dans la force de l’action collective le seul vecteur potentiel des transformations socio-écologiques attendues (Schlosberg et Craven 2019 ; Stevis 2020 ; Pruvost 2021, etc.). Est également volontiers soulignée une tendance au décloisonnement des causes sociales et environnementales ainsi que des répertoires d’action (Grisoni et Nemoz 2017), conjugué à une forme d’écologisation des mouvements radicaux et de radicalisation des mouvements écologistes (Malm 2020).

Cette littérature est, cependant, majoritairement focalisée sur les pays dit des « Nords », où se développe de manière eurocentrée le langage dominant de la transition socio-écologique ou encore celui se voulant plus radical de la transformation (Martin et al. 2020). La capacité des communautés dit des « Suds » à se mobiliser pour protéger leur environnement, les relations écosystémiques et les modes d’existence à l’œuvre en dehors des dynamiques d’exploitation hégémonique, est pourtant amplement documentée dans le champ de la justice environnementale et de la littérature sur l’écologisme populaire (Martinez-Alier 2014 ; Temper et al. 2018 ; Daré et Ba 2023 ; Cuadros 2018).

Les portées et les limites de ces lectures en termes d’écologisme populaire, ou encore de la subsistance (Pruvost 2021) invitent à explorer davantage les motivations ou causes défendues, dans leurs dimensions matérielles, ontologiques, idéologiques, existentielles ou encore spirituelles. Il s’agit également de penser les articulations entre justice sociale et justice pour la nature, ou encore la manière dont ces approches analysent les responsabilités, traduisent les rapports à la nature (points de vue de l’autre, perspectivisme, etc.), ou définissent des cosmopolitiques. Percevoir et rendre compte des effets, des formes de réceptions, et des traces d’archivage des actions collectives sur les communautés de vie, et de comment elles peuvent travailler à redéfinir les interdépendances entre humain·es et non-humain·es, impliquent de repenser les méthodes de recherche, telles que mises en œuvre jusqu’ici depuis les territoires des « Nords ».

Ces journées d’étude proposent d’explorer ce qui caractérise ces capacités d’agir, dans un contexte de changements globaux et d’aggravation des vulnérabilités écologiques dans les pays des « Suds », avec l’objectif de contribuer à la décolonisation des approches de la justice environnementale (Alvarez et Coolsaet 2018), de mieux connaître les formes de transformation dans lesquelles sont engagés les pays « des Suds », qui demeurent moins explorées, et de participer aux apprentissages qui en émergent dans la perspective de nourrir les savoirs et les pratiques de justice environnementale.

Ces journées sont pensées comme des étapes dans le cadre de réflexions autour de l’éthique de la recherche en justice environnementale, autour des pratiques et des savoirs d’enquête sur des collectifs – notamment en fonction de l’appartenance du chercheur ou de la chercheuse au groupe étudié. Elles contribueront également à alimenter les questionnements suivant autour desquels se définit un programme de travail plus large :

Axe 1 : Sous quels registres, quelles grammaires collectives et quels langages génériques (de justice environnementale, climatique, de transition, de transformation, de domination, etc.) sont exprimées les causes ou revendications, y compris dans leurs dimensions contextuelles ou territoriales spécifiques ?

Axe 2 : Qui sont les actrices et les acteurs de ces formes d’action collective ? Les caractéristiques tendent-elles à converger (en termes de genre, de race et d’ethnie, de classe sociale, d’âge et de génération, de validité) ou sont-elles hétérogènes ? D’où tirent-elles leurs ressources, moyens et capacités d’action (statut, communautés religieuses, réseaux, etc.) ?

Axe 3 : Quelles sont les modalités d’alliances, les relations de pouvoir ou encore les rapports de domination qu’elles entretiennent avec les autres acteurs et actrices de la société civile, des institutions ou de l’expertise scientifique ? Dans quelles situations s’incarnent-elles ? Quels sont les rapports aux institutions démocratiques : sont-elles dans des stratégies de participation, de prise de pouvoir, de proposition normative ou de rejet de l’État ? Quelles sont les formes de réponses des institutions à l’action collective ?

Axe 4 : La légitimité à agir de ces collectifs est souvent un des premiers arguments opposés sur certains territoires. Dès lors, comment les collectifs la construisent-elle ? Ou bien, font-ils avec l’absence de légitimité ? Quelle est la place de la recherche, des savoirs scientifiques et des formes d’expertise dans la construction de forme de légitimité d’action ?

Axe 5 : Qu’est-ce qui explique dans des situations d’injustice environnementale flagrantes, la non-action de certains groupes ? Quels freins structurels ou plus conjoncturels s’y opposent ? Quelles stratégies se jouent dans l’absence d’action, et quelles sont les potentielles autres formes de résistance ? Quand et pourquoi les mobilisations se font-elles ostensibles ou relativement discrètes, à « bas bruits » (Hayem 2020) ? Quelles sont les formes de résistance observées et tirent-elles leur force de leur visibilité ou au contraire de leur dimension cachée (Thiann-Bo Morel et Roussary 2021) ?

Bibliographie

Álvarez, L. et Coolsaet B., 2018, Decolonizing Environmental Justice Studies : A Latin American Perspective. Capitalism Nature Socialism, pp. 1-20.
Cuadros, G. M., 2018, Ambientalismo popular, Ediciones desde abajo.
Daré, W. et Ba, A., 2023, Justice environnementale dans les espaces ruraux en Afrique, Ed. Quae
Grisoni, A. et Némoz, S., 2017, Les mouvements socio-écologistes, un objet pour la sociologie. Socio-logos – Revue de l’Association Française de Sociologie, (12).
Hayem, J., 2020, Les mobilisations à bas bruits à l’épreuve des terrains africains, Journal des anthropologues, 162-163, 245-249.
Malm, A. 2020. How to blow up a pipeline, Verso Books.
Martin, A., Armijos, M.T., Coolsaet, B., Dawson, N., AS Edwards, G., Few, R., Gross-Camp N., Rodriguez, I., Schroeder, H., GL Tebboth, M. and White, C.S., 2020, Environmental justice and transformations to sustainability, Environment: Science and Policy for Sustainable Development, 62(6), pp.19-30.
Martínez-Alier, J. L’écologisme des pauvres. Une étude des conflits environnementaux dans le monde, Ed. Les Petits matins/Inst. Veblen, 2014 [2002, trad. de l’espagnol par A. Verkaeren].
Pruvost, G., 2021, Quotidien politique: Féminisme, écologie, subsistance, La découverte.
Schlosberg, D., & Craven, L., 2019, Sustainable materialism: Environmental movements and the politics of everyday life, Oxford University Press.
Stevis, D., & Felli, R., 2020, Planetary just transition? How inclusive and how just? Earth System Governance, 6, 100065.
Temper, L., Walter, M., Rodriguez, I., Kothari, A., & Turhan, E., 2018, A perspective on radical transformations to sustainability: resistances, movements and alternatives. Sustainability Science, 13(3), 747-764.
Thiann-Bo Morel, M. et Roussary, A., 2022, Basculement des eaux et protection de la biodiversité – lecture postcoloniale et justice environnementale in Deldrève, C. et Candau, J. Effort environnemental et équité. Les politiques publiques de l’eau et de la biodiversité en France (pp. 403-445). Peter Lang.

Programme des 5 et 6 octobre 2023

Ces 2 journées font suite à un premier séminaire EJJE sur l’action collective en justice environnementale, tournée vers l’hémisphère Nord (https://justiceenvironnementale.inrae.fr/seminaire/) Suite à ces échanges très riches, nous avons souhaité consacrer ce second temps des échanges à l’hémisphère Sud et notamment à l’Afrique et au Moyen-Orient, où cette thématique a été encore peu explorée. Les questions traitées (supra) s’inscrivent dans un programme de recherche plus large sur la capacité transformative de l’action collective en justice environnementale.

Le jeudi 5 octobre

9h30 accueil café

10h Introduction du réseau EJJE

10h15-12h45  Mobilisations et extractivisme en Afrique de l’Ouest
Animateur : Mody Diaw (Doctorant en sociologie, ETTIS-INRAE-Université de Bordeaux)
Avec :

Serigne Momar Sarr (Professeur de sociologie, Université Cheikh Anta Diop de Dakar) : « Communs et mobilisations sociales face aux impacts socio-écologiques des industries extractives au Sénégal : redevabilité en suspens ou ambivalence dans l’idée de justice environnementale ? »

Khadim Mbow (Doctorant en sociologie, Université Paris Cité) : « Analyse des phénomènes de conflits de légitimité, de controverses et de concurrence entre savoirs scientifiques, experts, profanes et citoyens : le cas des territoires industriels de Mboro et Bargny au Sénégal »

Déjeuner en commun

14h-14h30 Présentation de l’ouvrage Justice environnementale dans les espaces ruraux en Afrique par W. Daré (chercheur en sociologie, SENS-CIRAD Montpellier)

14h45-17h15 Mobilisations et gestion des déchets en Afrique du Nord et Moyen Orient
Animateurs : Bruno Bouet (Chercheur en sociologie, ETTIS-INRAE) et Maxence Mautray (Doctorant en sociologie, PAV-CED, Université de Bordeaux)
Avec :

Christophe Maroun (Chargé de Projet – Justice Environnementale. Heinrich Böll Foundation, Beyrouth, Liban) : « Déchets au Liban : Comment une crise environnementale a transformé le paysage politique et social »

Maha Bouhlel (Professeure assistante en géographie, Université de Manouba, Tunisie) : « la gestion des déchets comme symbole d’injustice environnementale en Tunisie »

Le vendredi 6 octobre

9h accueil café

9h30-12h30 : Table ronde sur les mobilisations discrètes, empêchées et autres formes de résistance
Animatrice : Marie Thiann Bo Morel (Maître de conférences en sociologie, Espace-Dev, Université de la Réunion)

Avec la participation de Valelia Muni Toke (Chercheure en anthropologie, Sedyl, CNRS-IRD, Villejuif)
et de Pablo Corral Broto (Maître de conférences en histoire, Université de la Réunion) et :

Aby Ba (Doctorante en science Politique, Université Gaston Berger du Sénégal) : « La mobilisation discrète à l’épreuve de l’aggravation des vulnérabilités écologiques en terrains africains: le cas du Sénégal »

Serigne A. Lahat Ndiaye (Doctorant en sociologie, SENS-IRD-Université de Montpellier) « Instrumentaliser des enjeux agricoles en contexte de conversion dans l’espace périurbain dakarois (Sénégal) : les mobilisations villageoises entre préjudices, stratégie de revendication de la terre »

Déjeuner en commun

14h-15h : Conclusions et retour sur le réseau EJJE (bilan-projets)

15h15-17h15 : Session d’organisation d’un réseau et colloque (en 2025) de Justice environnementale en Afrique (M. Diaw et W. Daré coord.)

Informations pratiques :

Lieu : amphi INRAE-Nouvelle Aquitaine
50, avenue de Verdun 33610 Cestas

Inscription (gratuite) obligatoire : lien formulaire

Accès rapide par Gare Gazinet Cestas 10mn depuis Gare Saint-Jean de Bordeaux ; ou si préférence par tram B direction Pessac – un covoiturage sera organisé depuis l’arrêt Unitec)
Ou par zoom (un lien sera envoyé à l’inscription)